Quand on cherche à savoir si son voisin est gay, on trouve.

Il vous tombe dessus un beau matin. On vous l’avait annoncé mais vous ne l’imaginiez pas comme ça : votre nouveau voisin. Il n’est pas forcément très beau. Pas forcément très athlétique. Pas forcément très jeune non plus. Il est rondouillard. Il a la quarantaine bien sonnée. Il est même un peu chauve. Mais il a l’air sympas, c’est déjà ça. Il sourit tout le temps et il a la mine toujours joviale du gars toujours ravi. Lors de son emménagement, il avait l’air aux anges. Une dizaine de potes l’aidait gaiement. Tous bâtis sur le même moule, tous tout sourire, tous tout content pour lui. Les meubles ont été déchargés dans l’allégresse et transportés en sifflotant. En deux petites heures, le camion était vide, tout et tous étaient à l’intérieur. Plus tard, après que le camion est parti, des pizzas sont arrivées avec des nanas. La soirée fut bruyante. Très bruyante et jusqu’à très très tard. Mais comment lui en vouloir ? Partout avait été scotchée, punaisée, glissée dans les boîtes aux lettres cette même affiche multi photocopiée en couleur s’excusant de la gène occasionnée avec écrit en plein milieu en très très grosses lettres violettes sur fond turquoise : Excusez le bruit samedi soir, j’emménage ! En plus, l’affiche était constellées d’étoiles et de smileys. Par contre, et ça certains pourraient lui en tenir rigueur à vie, cette affiche ne prévenait personne que le bruit serait un mélange kitchissou de medley top 50 du pire des années 80 et 90. « Besoin de rien, envie de toi » fut diffusés trois fois !

Mais… son sourire ! Dès le lendemain midi, tous ses amis partis, il est à votre porte. Surprise ! Bonjour, je suis Rémi, je m’excuse pour le bruit, je suis gentil, je veux être ton ami, si t’as envie ? Vous sort-il en souriant des yeux. C’est qu’il est sacrément social le nouveau voisin. En deux semaines, tous le monde le connait. Il a été invité au café partout, il a invité en retour. Inévitablement il vous invite donc à votre tour à entrer chez lui pour y boire un café un jour. Inévitablement, ce fut le jour où vous y étiez le moins préparé ! Il vous a surpris les bras chargés, s’est empressé d’offrir de vous aider et une fois qu’il avait six gros sacs de vos courses pendant de chacune de ses mains, il s’est dirigé chez lui en vous souriant. Vous avez suivi. Comment refuser ? Dès le seuil de son chez lui… stupeur. Une odeur de vanille subtile. La propreté étincelante. Un salon kitchissou. Des coussins à franges improbables mais confortables et ce gras gaillard de nouveau voisin qui vous apporte sur un plateau tupperware le fameux café, le sucre dans sa boite tupperware et du gâteau sous une cloche, tupperware elle aussi, mais vous vous en doutiez. Une fois le café servi dans deux mazagrans, il ne vous reste plus qu’à l’admirer touiller et faire tinter sa cuiller contre le bord comme une clochette. Et à nouveau, il vous sourit…. tout le temps.

Viens alors le moment de se raconter vos vies. Vous commencez par raconter que vous êtes célibataire. Vous poursuivez avec la même histoire que vous avez sorti à tout le voisinage. Celle qui parle beaucoup de votre boulot, de vos loisirs, de vos origines familiales, de vos goûts musicaux, de votre sport favori… de tout un tas de trucs qui évitent soigneusement le cœur de votre vie privée. Et bien voilà que votre gras gaillard en fait de même ! Il est dans la manutention, il a 48 ans, il adore la campagne mais doit vivre en ville, il fait pas assez de sport et il ne s’y connait pas trop en musique, mais ça, vous l’aviez déjà remarqué. Comme il vous ressert un café dans le beau mazagran peint à la main que vous lui tendez, vous notez qu’il n’a aucune bague, aucune trace d’ancienne alliance. Vous remarquez que ses ongles sont bien coupés aussi. Il poursuit sa lancé sur la musique et vous raconte ensuite ses goûts en matière de cinéma. Vous vous irritez vous même et vous rendant compte que vous venez de remarquer qu’il est rasé de près et qu’aucun poil ne lui sort du nez. Il tient à vous parler de ses voyages Il a découvert le Maghreb assez jeune et a un faible pour la Tunisie. Vous l’écoutez en vous énervant contre vous même. Vous ne pouvez vous empêchez de chercher des indices. Ce type est-il gay oui ou non ? C’est plus fort que vous. Il veut vous montrer des photos. Il va les chercher, et voilà que vous observez sa démarche balourde certes, mais un peu efféminée. Quand il s’assoit à côté, à vos côté, vous sentez son parfum. Lui aussi est subtil, mais lui aussi est bien là. Puis vous vous ressaisissez. Vous vous dîtes que vous êtes con. D’une part, ce type est sympas mais franchement moche. D’autre part, il a plus le profil du divorcé fan de Johnny que le profil du… de…. Et puis merde. Vous voulez savoir. Tandis qu’il vous parle de Djerba, vous lui demandez franchement s’il a des enfants, s’il est marié…. Là, il semble soulagé. Il vous sort de but en blanc qu’il est en instance de divorce et qu’il a trois gosses comme s’il vous révélait une faute. Vous le regardez, franchement. Il vous parle franchement de cette séparation. Cette séparation qui fut comme une aubaine, un poids qu’on vous enlève. Vous acquiescez, comme si vous compreniez. Il s’enhardit et vous parle nouveau départ, retour sur lui et nouvelle vie. Vous hocher de la tête. Vous vous dites que c’est rare un hétéro qui se confit comme ça ! Il vous dit qu’on a qu’une vie. Il vous sourit. Vous lui souriez à pleines dents. Gentiment. Vous vous redressez, vous vous apprêtez à dire c’est sûr et à développer un peu, faire un peu de psycho, voire même parler un peu de vous… sauf que sans crier gare, le gras gaillard s’est levé d’un bond et vous a sauté dessus. Que vous vous retrouvez par terre avec lui collé sur la bouche. Et que vous avez encore le mazagran dans la main. Sympa le nouveau voisin….

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