Il existe un lien entre les photographies de couples gays et les toilettes publiques
Toilet sex : La photographie de mariage gay
Depuis l’avènement du mariage gay dans de nombreux pays, les photographies de couples de garçons béats et la bague au doigt sont devenues légion. Des sites, des blogs, la presse people ou encore des plateformes de partage de photos en ligne nous abreuvent d’images léchées où des garçons enamourés fusionnent sur des fonds flous et artistiques.
L’amour y resplendit et les sourires rayonnent. Il suffit de tomber par hasard sur un de ces clichés au détour d’une page ou d’un clic pour ressentir tout le bonheur qu’on vous envoie. C’est aussi pénétrant qu’une flèche de cupidon. Hors de question de ne pas fondre, vous devez être sous le charme. Ces photographies sont belles et enivrantes comme des bulles de champ’.
Elles invitent aux likes et aux émojis extatiques. Les mots cul-cul, kitch et tartignole sont interdits, bannis car tabous. Pire, ils sont crades. Ils révèlent votre côté moche, pas du tout open pour l’enchantement. Vous êtes triste, petit, fermé et intolérant à la beauté, aux contes et à la féerie du merveilleux. Car ces photos, qui ne sont que du bonheur à l’état bio, ne vous demandent rien ! Juste à être aimées, avec de gros smileys. Elle partage du septième ciel. Il vous faut l’entrevoir. C’est un ordre ! Sinon, excusez-vous d’être gay !
Toilet sex : la photographie de sexe gay
Pourquoi faire un article sur la photographie de mariage de couples gay ? Pourquoi choisir de s’attaquer bille en tête à cette photographie colorée, festive, souriante et gaie (sans jeu de mot) ? Parce que je veux vous parler d’un tout autre univers photographique.
En fait, un univers photographique qui, au départ, semble aux antipodes même de ces noces somptueuses et parfumées, de ces unions publiques avec leur cortège de jouvenceaux ou de vieux compagnons et de leur grand banquet majestueux. Je viens vous parler de la photographie de sexe gay. Disons-le crûment, je veux plus exactement vous parler de la photographie de sexe gay dans les toilettes. De « toilet sex », si vous préférez, car ça fait toujours plus « trendy » quand c’est dit en anglais.
Attention je préviens, je ne parle pas des toilettes parfumées et javellisées de chez vous. Non, je parle des toilettes publiques qui font bien publiques, bien sales. Des toilettes publiques et pas toujours bien entretenues. Celles qui dégoûtent et qui écœurent parce qu’elles puent. Le genre de toilettes où tout gay en quête d’aventure et d’inconnus a visité au moins une fois. Le genre de toilettes publiques qui inspirent les backrooms. Les toilettes publiques que l’on retrouvent dans certaines vidéos pornos. Les toilettes publiques où ça baise, en somme ! Mais quel est le rapport entre la photographie de mariage gay et le sexe gay dans les toilettes ? Et bien il existe, figurez-vous. Il faut juste un peu de temps pour le voir, c’est tout.
Toilet sex : De l’utilité des toilettes publiques
Je comprends les cris d’orfraie certifiant que les sanisettes et autres lieux à touche pipi font parti du passé et qu’elles doivent le rester. Pourtant, bien que ces lieux restent l’image d’Épinal associée à la drague gay, au tournant du XXème siècle, à Marcel Proust ou à Jean Genet, le sexe dans les toilettes existe encore bel et bien.
Leur utilisation est toujours d’actualité, même avec Grindr, et ce qui s’y fait n’a pas tellement changé depuis Proust. Ce sont les toilettes qui ont changé. De place, d’abord. Finies les sanisettes en pleine rue, ouvertes aux quatre vents. De standing aussi, urinoir en métal, néons et même accessibilité handicapés, donc spacieuses. Qu’elles soient sur une aire de repos, d’autoroute, de parking à routiers ou dans une galerie marchande, à côté d’une salle des fêtes ou sur la place du marché, une seule question mérite d’être posée. Pourquoi des toilettes ? Et bien, parce que les toilettes publique sont nos amies. Elle l’ont toujours été.
On l’oublie fréquemment, mais elles ont le mérite d’être souvent genrées. C’est à dire des toilettes pour hommes et uniquement pour eux. Qui sait combien de femmes avec poussette se sont retrouvées par mégarde au mauvais endroit et s’en souviennent encore ! Nos amies les toilettes ont également l’avantage d’être à l’abri du vent et de la pluie, ce qui n’est pas négligeable quand on a le pantalon au niveau des mollets. Il y a des cabines individuelles et l’eau courante aussi. Là, je ne veux pas entrer dans les détails mais disons que les feuilles qu’on trouve dans les bois où les parc, ou à défaut un paquet entier de mouchoirs en papier ne remplaceront jamais un peu d’eau, même très peu. Toutes ces qualités sont indéniables et lorsque deux garçons se contactent sur une application et finalisent la rencontre au milieu de la ville ou derrière un stade, des toilettes publiques dans les environs primeront toujours sur l’orée d’un bois, un coin de mur ou le siège arrière d’une voiture.
Toilet sex : les photographies de Marc Martin
En décembre 2017, le photographe Marc Martin a monté une exposition au Schwules Museum (musée de l’homosexualité) de Berlin. Son titre : Toilettes publiques, affaires privées. Composée de photos d’époque, de tableaux, de dessins ou d’objets divers, cette exposition faisait également découvrir aux visiteurs des extraits de films. Il y avait des témoignages aussi, la plupart tout droit sortis des archives de la police des mœurs où « Les aventures dans les toilettes publiques ont laissé plus de traces […] que dans la grande littérature » selon Marc Martin lui même. Le projet, ce sont surtout des photographies de l’artiste. Autant le dire tout de suite, elles tranchent avec le reste.
En couleurs, avec de beaux garçons, elles se concentrent sur les regards et les angles de vues. En tant que spectateur, on est même parfois dans la photo, dans le rôle du voyeur. Leur côté idéalisé ne doit pas faire passé à côté de ce qui est mis en avant : le bleu de travail du gars de chantier reluqué par un marin en permission encore en uniforme.
Du cuir, du jean, des vestons chics et des débardeurs bien prolo. Des casquettes, des cheveux bien coiffés, d’autres ébouriffés et quelques calvities. Des barbes de rockers et de fines moustaches taillées. Tout y est, ou plutôt devrais-je dire, toutes les classes sociales y sont. Les toilettes publiques comme premier lieu de rendez-vous de la communauté gay avant même l’idée qu’une telle communauté ne voit le jour. On dit que l’homme est un animal d’instinct, que même sorti de son environnement primitif depuis des années, il suffit d’une allusion, d’une situation particulière ou d’une occasion pour que des réflexes anciens remontent à la surface.
Aujourd’hui encore, et même si la majorité d’entre nous n’avons pas vraiment connu ces lieux, combien vont à l’urinoir sans avoir l’œil qui louche un peu sur le voisin ? Mieux, combien refusent de faire à l’urinoir justement afin d’éviter d’hypothétiques regards malsains ? Préfèrent-ils alors s’isoler dans une cabine ? Remarqueront-ils tout de suite s’il y a un glory hole ? Cette exposition rappelle combien les toilettes publiques existent encore en nous. Le tag « pissing » qui nous vient de la pisse y est né. Où pouvait-il naître ailleurs d’ailleurs ?
Toilet sex : le rapport avec les couples gay
Pour en revenir à mon hypothèse de départ sur les liens entre la photographie de mariage et les toilettes publiques, je laisse Marc Martin parler pour moi :
« Le week-end du vernissage, un homme âgé pleurait discrètement dans la salle de l’exposition avec le livre contre son cœur. Le livre était ouvert précisément sur les photos anciennes de Berlin. 60 ans plus tôt, ce vieil homme y rencontrait un inconnu. Un inconnu qui allait devenir son compagnon de vie, un compagnon aujourd’hui disparu. J’ai pris un café avec lui au bar du Musée. C’est là qu’il m’a raconté cette rencontre ; une belle histoire mais assez banale en soi. Ce qui m’a profondément bouleversé, c’est qu’il n’avait jamais jusqu’ici osé avouer à qui que ce soit la vérité sur sa rencontre avec l’homme de sa vie, précisément parce qu’elle avait eu lieu dans une pissotière ! » Vice.com, 2017, interview de Kevin Clarke
Les mariages sont toujours codifiés et beaucoup de gay ne manquent pas à ces règles bien établies. Il y a bien évidement les familles, les amis et parfois les collègues. Il y a le passage en mairie, le vin d’honneur et le fameux banquet ou toutes les têtes et les regards sont rivés sur les tourtereaux. Comment vous êtes-vous rencontré ? est la question facile à éluder d’ordinaire mais il faut bien broder une histoire pour le jour de ses noces. Combien osent raconter celle-ci :
On s’est rencontré sur Grindr. On s’était donné rendez-vous sur un parking et on a fait plus ample connaissance dans les toilettes publiques, juste à côté !
Toilet sex : pour finir
Il faut savoir qu’on pouvait rencontrer de très beaux mecs dans les toilettes publiques.
Le 7 avril 1998, dans celles d’un parc arborée de Beverly Hills, certains sont tombés sur George Michael. Sont-ils tombés à genoux, l’histoire ne le dit pas, mais George en a fait une chanson où les toilettes publiques s’illuminent à la Saturday Night Fever et où George est tout en déhanchés dans un uniforme de policier. De quoi exiger qu’on ressuscite l’ambiance des sanisettes d’antan.
moi je refuse de faire à l’urinoir cause odeur … quand je dois m’arrêter sur autoroute je fais dehors contre un arbre à l’air pur !! … au moins je n’aurai pas à inventer des histoires si je me marie !!!