Préparez vous à chialer : le 29 Juillet 2017 dernier, Tony Patrioli est mort.
Un drame sans nom s’est abattu sur le monde de la photographie gay. C’est violent ! Une page de l’histoire de l’érotisme homosexuel se tourne et j’apprends ça comme ça, sans préparation, en faisant connement mes petites recherches pour mon article quelques quatre mois plus tard… Et Tony Patriloi est mort en pleine douzième édition du championnat d’Europe de football féminin en plus ! J’étais convaincu qu’ils avaient dû arrêter la compète. Imaginez les filles en larmes sur le terrain, les spectateurs meurtris dans les gradins. J’ai vérifié : même pas !!! Et puis je me suis rappelé qu’en fait, le championnat d’Europe de football féminin, tout le monde s’en fout. Ça soulage un peu. Mais penser qu’Emmanuel Macron et sa femme se baladaient au Touquet l’air de rien sous l’œil des caméras le même jour… Aucune déclaration. Que dalle. « Niente » aurait dit Tony.
Reprenons nos esprit. Je sais que parmi vous, certains se moquent déjà. Pourquoi faudrait-il chialer ? Patrioli c’était qui ? C’était quoi ? Et bien Patrioli, c’était trois fois rien. Juste ça :
Patrioli est né en 1941 et le virus de la photographie le prend dès 1965. En dilettante d’abord, il photographie surtout ses amants du moment. En professionnel ensuite, au milieu des années 70 avec l’essor de la presse érotique gay.
Entre temps, Patrioli s’est formé à l’école de photo publicitaire de Milan. Au départ, fortement inspiré des nus de Wilhelm Von Gloeden, il s’en détachera pour créer son propre style. Mon avis personnel est qu’il est quand même très difficile de ne pas voir l’univers de Von Gloeden dans toute « l’œuvre » de Patrioli. Je mets « œuvre » entre guillemets. En bon technicien, Patrioli fait des photos propres : les modèles sont au centre, les ombres sont maîtrisées et l’arrière plan, souvent flou, n’a aucun intérêt. C’est du noir et blanc parce que l’époque est encore au noir et blanc.
Enfin, Patrioli, c’est des beaux gosses hétéro dans la vingtaine parce que Patrioli les aimait sûrement comme ça. Vous l’aurez compris, je ne pense pas que Patrioli, ce soit du grand Art. Von Gloeden faisait déjà des photos à peu près semblables avec des moyens techniques largement inférieurs. Une œuvre par conséquent plus valorisante car Von Gloeden photographiait aux origines de la photo, au tournant du vingtième siècle, avec boîtiers et objectifs de l’époque. C’est à dire à des années-lumière des boîtiers et objectifs disponibles dans les années 60 et 70.
Mais alors pourquoi tout ce foin sur Patrioli, me demanderez-vous les mains sur les hanches ?
Si c’est pas du grand art, alors qu’est-ce ? Mais de l’érotisme, très chers ! Un corps, c’est érotique. Aussi érotique qu’une pâtisserie. Une pâtisserie n’a pas besoin d’être photographiée par un génie de l’image pour être appétissante. Un photographe bon technicien et fin gourmet arrivera toujours à vous faire partager ce que son œil de gourmand voit.
Car la photo, avant d’être de l’art, c’est d’abord ça ! Un regard, un œil. Ce que l’on retient des photos de Patrioli, c’est qu’il devait sacrément aimer les garçons. Car il faut en avoir regarder beaucoup pour remarquer ce qu’il y a de plus subtil en chacun. Il faut également savoir les regarder pour n’en photographier que le profil qu’il faut, l’attitude qu’il faut.
Tel le confiseur devant de beaux morceaux de sucre, le regard du photographe décèle la beauté naturelle et lorsqu’on regarde une de ses photographies, c’est d’abord par son œil à lui qu’on apprécie le modèle. Derrière son objectif, l’œil de Patrioli n’est jamais vulgaire. Il aime sans toucher, il saisit des peaux cuivrées sans goûter. Les regards sont francs et les poses simples, jamais lascives mais toujours étudiées. Étudiées pour que la beauté brute apparaisse colorée, toute en nuances par delà le noir et blanc.
Ses photos exposent des beaux gosses comme des confiseries. Confiseries exotiques qui étaient ensuite appréciées jusqu’en Europe du nord. De ses revues planquées sous le lit naissaient alors, au milieu de nuits bien glacées, de doux rêves siciliens.
Des rêves sensuels et suaves, tout peuplé d’appétissants morceaux de sucre brun garantie sans OGM. Des beautés méditerranéennes, parfumées comme le sable et épicées comme l’olivier. Aujourd’hui encore, les clichés de Patrioli nous replongent dans ses années 60 et 70. Son œil apporte du soleil, du dépaysement… et des fantasmes. En mourant, c’est un regard qui disparaît mais c’est aussi une époque.
Si le sucre brun de Tony Patrioli fait revivre en italien les années 60 – 70 et les rêves de ragazzi des plages méditerranéennes, le sucre blond de Mel Roberts, lui, nous emmène illico sous le soleil de la Californie de la même période. Vous l’aurez compris, les garçons de plages étaient très populaires à l’époque.
L’américain en était même le spécialiste. Né en 1923, il a étudié l’art de la cinématographie à l’armée d’abord (deuxième guerre mondiale) et à l’université ensuite. Ses photos n’étaient pas, elles non plus, du grand art. Pourtant, comme celles de Patrioli, elles révèlent un solide intérêt du photographe pour les garçons, et pour les blondinets du coin en l’occurrence.
J’avoue que certains de ces modèles étaient bruns, mais ce n’était pas la majorité. Généralement plus souriants que les modèles de Patrioli, sans doute l’école américaine, les modèles de Roberts sont tout aussi jeunes qu’ils sont bien faits. Le décors de plages ou de piscines n’ont pas grand intérêt.
Le modèle, et lui seul, est le sujet de la photographie. Souvent torse nu, parfois en tenue d’Adam, il fait alors plus nudiste en goguette qu’exhibitionniste libidineux. Là non plus d’ailleurs, pas de pornographie. L’œil de Roberts connaît ses modèles. Ce sont avant tout des amis, des amants. Ce n’était pas forcément le cas de Patrioli. Les modèles sourient donc avant tout à Roberts plus qu’à celui qui regardera la photo plus tard, dans les magazines. Les attitudes sont nonchalantes et décontractées.
L’ambiance est bon enfant, candide mais la sensualité est là, est bien là. Le regard de Roberts est amoureux, intime.
C’est par son œil vissé derrière son rolleiflex que l’on voit et profite de ces jolis garçons. De tendres et alléchantes frimousses qui révèlent un imaginaire tout mimi fleur bleue, presque pudique. Nul doute qu’après s’être repu en reluquant de long en large cette appétissante jeunesse de la côte ouest, les lecteurs de « the young physique » devaient faire de beau rêves acidulés.
Où qu’elle soit vue en Amérique, une photographie de Mel Roberts dégustée avant le coucher annonçait une douce nuit, une évasion californienne et des couleurs chatoyantes et engageantes. La plage, le ciel bleu, le soleil et d’adorables petits sucres blonds avec un arrière goût de sel du pacifique.
Mel Roberts est décédé en 2007, dix ans avant Tony Patrioli.
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p lang= »fr-FR »>Aujourd’hui leurs photos font un peu désuètes mais leur sensibilité et l’érotisme qui s’en dégagent sont toujours là. Des photographies à des années lumières des photos contemporaines. Des photos d’une époque plus innocente, avant le sida. Une époque où on achetait des magazines gay simplement pour y voir de jeunes et jolis garçons plus ou moins dénudés. Et souvent ça suffisait.
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commentaires
Merci pour ces découvertes !! ... Aux USA, il y avait aussi Bob Mizer
J’Aime bien ses photos